CRISE DU LOGEMENT 2. LE FAUCON DOMESTIQUE

- juin 18, 2024

Le crécerellette : le faucon domestique © Djépi

Photos : Nad, Djépi

Texte : Djépi

Le nom « moineau domestique » me fait sourire. Nul doute qu’il fréquentait déjà les sous-toitures quand le grand Carl von Linné l’a baptisé Passer domesticus (domus = maison en latin, domesticus = de la maison), comme il le fait encore aujourd’hui.

Mais il y eut des moineaux bien avant qu’il y ait des maisons ! Il occupait alors pour y nicher des cavités dans les arbres, les falaises, etc…

Il y eut des moineaux "domestiques" bien avant qu’il y ait des maisons © Djépi

Les hirondelles sont dans une situation comparable. L’hirondelle rustique n’a pas toujours niché dans des granges et l’hirondelle de fenêtre n’a pas toujours collé son nid à nos façades ! Certaines espèces, d'ailleurs, comme l'hirondelle des rochers, occupent encore souvent des emplacements de nidification naturels.

L'hirondelle des rochers occupe encore souvent des emplacements de nidification naturels © Djépi

La cigogne blanche est un autre cas classique. Cet oiseau jouit depuis longtemps de la sympathie de l’homme et construit généralement son nid sur un bâtiment, même en pleine ville, sur un poteau, sur une plateforme aménagée pour l’accueillir. Seules de rares dissidentes votent pour un retour à la nature et s’installent sur un grand arbre.

La cigogne blanche construit généralement son nid sur un bâtiment © Djépi

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Il y a aussi un faucon très domestique : le faucon crécerellette. S’il occupe naturellement des cavités dans des arbres ou des rochers, en Espagne, de nos jours, il est essentiellement inféodé aux constructions humaines.

Nous circulions en voiture dans les larges pâturages d’Estrémadure (Espagne), espérant rencontrer des espèces d’oiseaux steppiques. Arrêté à une fourche de chemins pour vérifier la direction à prendre, je remarque un petit faucon qui tourne rapidement autour d’un groupe de bâtiments agricoles. Et, très vite, je vois qu’il n’est pas seul. Approchant raisonnablement sans quitter le véhicule, je confirme aux jumelles : il s’agit bien d’un groupe de faucons crécerellettes.

Je remarque un petit faucon qui tourne rapidement autour d’un groupe de bâtiments © Djépi

Un mâle se pose sur les vieilles tuiles, mais notre présence le tarabuste et il se remet en vol, tournant autour de nous avec quelques congénères. Ils s’écartent, reviennent, se posent sur un toit plus éloigné, décollent de nouveau. De toute évidence, nous les dérangeons et nous quittons l’endroit sans tarder.

Nous sommes tombés, « au milieu de nulle part » sur une mini-colonie de faucons crécerellettes, installée parmi les tuiles et les tôles de ces constructions utilitaires.

Un mâle se pose sur les vieilles tuiles © Djépi

Certaines villes historiques, comme Cáceres par exemple, s’enorgueillissent de leur colonie de faucons, à l’abri de la protection draconienne du patrimoine architectural. Mais c’est dans un simple village estrémègne très soucieux de sa protection que nous aurons la plus belle rencontre avec le petit rapace si domestique.

Un village estrémègne très soucieux de protection © Nad

Posée sur le toit bas de l’église, presqu'invisible sur les tuiles rousses, une femelle attend, placide. Elle est à peine plus grosse que les tapageurs étourneaux unicolores qui fréquentent le même hôtel.

Sur le toit bas de l’église, une femelle attend, placide © Djépi

Des cris dans le ciel, une fusée arrive et se pose près d’elle. C’est un mâle et, sans trop de préliminaires, il chevauche sa partenaire pour une copulation qui durera près de 30 secondes. J’étais prêt à capter la scène, les déclics de l’appareil photo se succèdent.

Son œuvre terminée, monsieur s’envole et se pose sur un nichoir tout proche, comme pour s’assurer que madame a bien compris sa mission…

La population européenne de faucons crécerellettes connaît une forte régression, probablement liée à la raréfaction des gros insectes dont il se nourrit. Sa protection et le fait qu’il se soit adapté aux bâtiments et nichoirs artificiels permet d’éviter le pire.