Des cerfs au menu, épisode 3/4

Les jours s’égrènent, le brame progresse et décroît. Que deviennent JL, Le Crabe, Joli Quatorze et les autres ? Saisissez vos jumelles et suivez-moi... Mais avant tout, si ce n’est encore fait, découvrez les premiers épisodes de la saga pour faire connaissance avec les stars !

 

Sur la scène principale : entracte

Le fond de l'air reste piquant, mais le soleil d'octobre est éclatant. Réfugiées à l'ombre de la lisière, les biches ruminent paisiblement. Au milieu d’elles, JL rêvasse. La cathédrale qui surmonte son crâne vacille comme une tour de Pise et s’effondre pour de bon. Certaines biches se sont écartées pour aller rendre visite à leurs rejetons, daguets ou petits ados, rassemblés cent mètres plus bas. Cela fait maintenant 3 semaines que JL est maître de place et on peut comprendre sa lassitude

Le repos du guerrier. © Djepi

Je compte attentivement : 32 non boisés l'entourent... il en manque donc une poignée. Je trouve l'explication un peu plus loin. De retour aux affaires après une semaine sabbatique, Joli Quatorze s'est taillé un petit harpail d'une demi-douzaine de biches, bichettes et faons.

Joli Quatorze conserve au flanc gauche les souvenirs de son brame 2018. © Djepi

Lui aussi semble éreinté, il pose souvent le museau sur le sol, bascule sa ramure vers l'avant et somnole. Jamais très longtemps, car des sous-bois proches sortent régulièrement des raires auxquels il faut bien répondre, si on veut assumer son statut de cerf dominant. Les derniers jours ont été rugueux pour Joli Quatorze et son flanc gauche porte de longues balafres, heureusement superficielles. Il est encore moins attentif à ses compagnes que JL et je suspecte que plus aucune d'entre elles n'est en état de réceptivité. Joli Quatorze a-t-il manqué le dernier train ? 

Entre les deux hardes, un élégant intrigant fait la navette : c'est Erik, qui porte 14 cors. Il a fière allure, on dirait qu'il danse en marchant, mais il n'a pas l'ampleur de ses aînés.

Le jeune Erik aurait-il une idée derrière la tête ? © Djepi

Après avoir longuement bavardé dans le club des ados, il s'approche à pas feutrés de la troupe de JL et détourne quelques biches en balade qui le suivent distraitement. Mais on dirait qu'il ne sait trop qu'en faire, car le voilà qui les quitte aussitôt pour aller titiller Joli Quatorze. Avec l'air désappointé de coquettes moins séduisantes qu'elles ne l'espéraient, les dames reviennent entourer JL et bercer son sommeil.

 

En coulisses : un soupçon de nervosité

Sous les arbres du coteau qui flanque au Nord la grande pâture, s'activent une poignée de figurants. L'ambiance est changeante, parfois un peu électrique. Alors qu'ils se promenaient benoitement côte à côte, deux adultes baissent soudain la tête et s'affrontent brièvement. Les heurts des andouillers crépitent comme un feu de Bengale, pour s'interrompre aussitôt. Les deux cerfs reprennent leur balade de concert et s'enfoncent dans la remise, après avoir échangé un long regard avec ce drôle d'œil rond qui les observe en émettant de sourds hoquets en rafale.

Chaque cerf possède sa ramure, son pelage, son visage et ces deux amis d'âges comparables le montrent bien. Avec un peu d'entraînement, les reconnaître individuellement n'est guère compliqué. © Djepi

Planqué dans un repli du coteau, le club des grands ados de 3-4 ans ne sait plus trop où se fourrer. Pas question pour eux de s'aventurer sur la prairie comme le font leurs jeunes cousins : les dominants ne leur pardonneraient pas. Mais il doivent aussi rester à distance de ces figurants ambitieux et agressifs qui s'agitent en coulisses et se voient déjà en haut de l'affiche. Quelle vie de cerf !
Les cerfs sont très sociaux et se groupent par catégories d'âge. Durant le brame, les ados sont contraints de rester prudemment aux abris. © Djepi

Au club, il ne manque que Brisefer, où est-il donc passé ? Un tour des pâtures aux jumelles me fait sursauter... Là-bas, au loin, au beau milieu de la harde principale, un animal détonne : il est couvert de boue, a le cou enveloppé d'une courte crinière et... porte sur la tête deux minces perches brisées. Cet incorrigible séducteur de Brisefer est encore occupé à jouer avec le feu ! Mais heureusement, JL dort...

Jeanma passe en coup de vent entre les troncs, il est fort agité. C'est un grand cerf mûr, avec de hauts bois ramifiés portant des pointes acérées. Son corps est couvert de boue séchée et il rote agressivement tout en trottinant. Lui non plus ne sortira pas intact de cette saison de rut : son oreille gauche a trinqué et s'affaisse sur le côté de son crâne, comme le calot d'un caporal en goguette. Le reverrons-nous ?

 

Le calme avant la tempête

Le vieil Aries soupire à des jours plus tranquilles. © Djepi

Au bord de la bande boisée qui masque la prairie clôturée, Aries feuillette l’album de ses souvenirs. Son profil ovin, ses bois longs mais usés, ses mouvements lents et raides évoquent le vieux cerf fatigué. Derrière lui, dans l'ombre, une haute silhouette fait les cent pas et règle à tâtons le volume de son haut-parleur. C'est Petrus, magnifique 16 cors musclé qui ferait pâlir de désir une biche myope ... s'il n'était pas aussi timide. Chaque fois qu'il profère une remarque sonore, arrive d'en bas la réponse catégorique de Joli Quatorze : la place est prise, reste où tu es.

Splendide 16 cors, Petrus est cependant un cerf discret. Taille et caractère ne sont pas toujours assortis.© Djepi

L'après-midi s'avance. Petit à petit, des biches se lèvent pour se dégourdir les jambes et surveillent le moindre mouvement de la meneuse. C'est elle, et elle seule, qui donnera le signal du départ vers la zone de pâturage de son choix. Quant aux Dons Juans, quelle que soit leur carrure, ils n'auront qu'à suivre.

Alors que je joue à cache-cache pour saisir une image de Petrus-le-timide qui louvoie entre les trouées de lumière, je constate que le volume sonore a soudainement augmenté. Derrière la clôture, dans la prairie, une haute silhouette a le verbe haut : Jeanma est de fort mauvaise humeur... Enduit de boue fraîche, il vient roguement défier son discret voisin de palier. Pourquoi ? Une raison obscure nichée dans les méandres de son cerveau baigné de testostérone, car il n'y a pas une biche disponible à l'horizon.


Quand Jeanma s'approche de la clôture, on comprend vite que ce n'est pas pour faire simplement la conversation... © Djepi



 

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