RIVALITES pour un TRÔNE Part. 1

Photos et texte : Djépi

Durant les 2 semaines que dure la saison du brame, chaque cerf de harde est comme un roi sur son trône. Sur les 1.700 ha de la réserve de Dyrehaven (Danemark), il y a au moins une douzaine de trônes à pourvoir. Et certains sont plus convoités que d’autres.

L'empereur sur son trône, par un matin de brume © Djepi

Voyez ICI la galerie de portraits des cerfs du brame 2023

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Les heurs et malheurs de Capitaine

Nous arrivons le 24 septembre au matin, alors que le jour est déjà bien levé. Un gros cerf mène le bal sur la place de Trepile, toute proche de l’entrée. C’est Capitaine, un 24 cors mature que je connais depuis ma première visite, en 2021.

Capitaine mène le bal sur la place de Trepile © Djepi

Je l’avais toujours observé solitaire et à l’écart : quoiqu’il soit parmi les plus puissants, Capitaine ne faisait pas partie des mâles de très haut rang. Mais cette fois, entouré d’une trentaine de non boisés, il fait une cour assidue et bruyante, tout en répondant à ses voisins.

C’est déjà le pic du brame et beaucoup de femelles sont en œstrus. Certaines ne resteront pas insensibles à ses avances puisque, le 25 en soirée, je le vois réussir une saillie et "monter en chandelle" selon l'expression consacrée.

Capitaine saillit une biche et "monte en chandelle" © Djepi

La vie n’est pas de tout repos pour Capitaine.

D’une part, juste devant lui, le costaud Bobo tient une grosse harde sur les grandes pâtures où culmine le pavillon de chasse royal de l’Hermitage. Il était déjà actif au même endroit l’an passé, mais n’avait guère récolté de résultats. Cette saison, il parvient à ses fins et c’est un maître de place énergique. Bobo n’hésite pas à faire incursion sur le fief de Capitaine, et celui-ci emmène aussi ses biches sur les plates-bandes de Bobo.

Bobo est maître de place sur les grandes prairies © Djepi

Dans son dos, à quelques centaines de mètres, c’est un véritable tohu-bohu de cerfs et de biches près de la remise boisée de Tårbaek, et certains s’invitent régulièrement à la fête sur Trepile.

Tout cela crée évidemment pas mal d’agitation et Capitaine a fort à faire pour rester sur son trône.

Sans vergogne, Bobo "casse du bois" et prend ses aises au beau milieu du fief de Capitaine © Djepi

Le 25 vers 20h, un combat éclate en lisière de la zone. Durant plus de 5 minutes, les cerfs ferraillent, poussent, tournent sur place dans le silence. Il aura fallu le claquement sec des bois qui se heurtent pour que je me rende compte de quelque chose. Cela se déroule sous les arbres, il fait très sombre et mon autofocus ne peut plus rien pour moi.

Sous les arbres, un long combat se déroule dans l'obscurité © Djepi

Je dois photographier au jugé, en très nette sous-exposition. Un cerf finit par se dégager de la confuse mêlée et s’enfuit. Qui est-il ? Qui est le vainqueur ? J’ai l’impression qu’un des protagonistes du combat était Capitaine, mais la qualité des images obtenues ne me permet pas d’en être certain.

Le 26, la harde de Trepile est passée sous le contrôle de Sleepy © Djepi

Quoi qu’il en soit, le 26, Capitaine a disparu. La harde de Trepile est passée sous le contrôle de Sleepy qui est de retour « chez lui » : en 2022, c’était précisément lui qui avait contrôlé cette place durant tout le brame.

Je ne reverrai plus Capitaine durant mon séjour, il a dû renouer avec sa vie solitaire, sous le couvert forestier, au sud des places de brame.

Capitaine fut sans doute le perdant du combat du 25 © Djepi

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Les ambitions mesurées de Twix

La place de Dousbad Mose est plutôt paisible et Twix y règne en maître incontesté. C’est un cerf massif à la ramure ultra-puissante et barbelée (24 cors) qui a de quoi décourager les rivaux les plus avides, et attirer les photographes avides d’adrénaline. Mais d’adrénaline, il n’y a point : la royale existence de Twix est partagée entre attentions aux biches, quelques coups de brame et de belles siestes au soleil.

Twix est un monarque tranquille © Djepi

Maintenant monarque paisible, il a cependant dû bagarrer en début de saison pour assurer son trône, car il porte des marques du côté gauche, près de l’œil qui est heureusement intact.

Twix a 8 ans, c’est un jeune adulte en pleine possession de ses moyens et je suis un peu déçu de le voir se satisfaire de cette place qu’il occupe facilement depuis trois ans. En 2021, à peine adulte, il avait rivalisé armes à la main avec son voisin Spat, le big boss de la place centrale. En 2022, il avait découragé avec autorité les insistants intrigants Flash et James.

Le millésime 2023 est en comparaison, pour lui, un long fleuve tranquille.

Au début de la saison, Twix a reçu des blessures près de l'oeil gauche © Djepi

La stature imposante de Twix lui permettrait de briguer le trône ultime, sur la place n°1, distante de quelques centaines de mètres seulement. Mais la puissance n’est pas tout : en a-t-il le caractère… ? Si oui, son jeune âge lui réserve encore de belles possibilités d’ascension.

Twix est un jeune cerf qui garde de belles possibilités d'ascension © Djepi

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La promotion d’Emile

La clairière de Blå Bomme est un peu à l’écart des chemins fréquentés, et elle attire nettement moins de photographes, ce qui n’est pas pour me déplaire. Emile, grand 26 cors à la ramure largement ouverte, y contrôle une jolie harde.

Emile règne sur la clairière de Blå Bomme © Djepi

Il n’a guère de difficultés à écarter les gringalets de 14 ou 16 cors qui se présentent à l’occasion. Gauguin traîne un instant sur le proche coteau boisé avec quelques compagnes, mais ses ambitions paraissent très limitées, peut-être suite aux déboires de l’an passé face à Spat.

Gauguin a des ambitions limitées cette année © Djepi

Dans le sous-bois voisin de Kaempegrav, Gaspard rumine sa déception : c’est lui qui tenait la place de Blå Bomme l’an passé. Quand Emile s’éloigne, il apparaît dans la prairie et harangue les biches, mais il retourne vite à couvert : son compère a dû lui « expliquer » quelques jours plus tôt qui porterait la couronne cette année.

Ces deux cerfs se ressemblent fort : même pelage chocolat, même ramure évasée, ils pourraient être frères. Si tel est le cas, félicitations à la maman : elle a fait de beaux bébés !

Pour Emile, le trône de Blå Bomme et sa harde fournie, proche du centre névralgique du brame, est une belle promotion. En 2022, il était installé sur une place secondaire écartée et discrète, à l’abri des convoitises et… des photographes (sauf moi 😁). Il s’emploie désormais à assurer un rôle plus « people ».

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L’enfer de Tårbaek

Les environs de Tårbaek sont une véritable pétaudière. Autour de la remise boisée adossée à la limite de la réserve où beaucoup d’animaux passent la journée à l’abri, l’agitation est perpétuelle. Peu soucieuses des intérêts des mâles, les hardes de biches vont et viennent, se divisent, se regroupent, et nombreux sont les cerfs à venir tenter leur chance.

Ambitieux jeunots, adultes de rang secondaire et monarques détrônés se croisent, se défient, se fuient. Sans cesse, éclatent les raires et les rots de mâles qui se pourchassent.

Beaucoup ne font que passer, vite dégoûtés par la concurrence nombreuse et lourdement armée. Quelques-uns s’accrochent et tentent de capter des biches de passage. Victor et Cassius sont de ceux-là et ils enregistrent temporairement quelques succès.

Mais c’est Raphaël, 26 cors, finit par occuper le trône. Le 27 septembre, il mène grand tapage toute la journée dans l’ombre épaisse de la remise. Le 29 au soir, en maître de place installé et autoritaire, il presse les biches de ses avances.

Mais le pic du brame est passé et la plupart d’entre elles ont déjà été fécondées. L’an prochain, Raphaël devra revoir son agenda !

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