Dyrehaven, le pays où les cerfs sont rois. Episode 1/5
Le pays où les cerfs sont rois
Le Jaegersborg est un domaine forestier qui se situe à une 10aine de km au Nord de Copenhague, capitale du Danemark. Des banlieues urbaines le bordent au Sud, la mer Baltique le limite à l’Est, et des zones plus campagnardes l’entourent à l’Ouest et au Nord.
Dyrehaven est un paradis pour ceux qui aiment observer le brame du cerf © Djepi |
Ce domaine qui affiche aujourd’hui 17 km² a été créé en 1669 par le Roi Frederik III, puis agrandi et clôturé en 1670 par son fils et successeur Christian V, comme domaine de chasse à courre*. Christian V avait été séduit par cette « distraction » lors d’une visite à Versailles, auprès de son homologue Louis XIV. Alors que les agriculteurs locaux étaient déplacés, des cerfs et des daims furent importés au Jaegersborg afin d’alimenter les chasses royales.
1600 daims, 300 cerfs élaphes et 100 cerfs Sikas occupent les 1100 ha du sud de la réserve de Dyrehaven © Djepi |
Le Jaegersborg a été ouvert au public dès 1756 et reçoit aujourd’hui près de 8 millions (!) de visites annuelles, alors qu’il est toujours propriété de la couronne. Une clôture le divise en deux. Les 11 km² du Sud, partagés entre bois, bosquets et prairies parsemées de vieux arbres isolés, hébergent 1600 daims et 300 cerfs élaphes descendant des animaux du 17è siècle. 100 cerfs Sikas (l’espèce fut importée en 1900) complètent l’effectif. Cette zone est appelée « Dyrehaven », c’est-à-dire « refuge des cerfs » en danois.
Les 6 km² du Nord sont purement forestiers et dédiés à la faune typique de ce milieu, dont une 30aine de chevreuils. La clôture évite l’entrée des gros brouteurs que sont cerfs et daims.
Poumon vert de Copenhague, le Jaegersborg est accueillant aux visiteurs.© Djepi |
Le site a été classé en tant que paysage exceptionnel par l’UNESCO en 2015. Dyrehaven est peuplé de chênes, hêtres, aubépines, châtaigniers, érables et autres essences dont le plus vieux représentant est un chêne de 850 ans. Il était jeune encore lorsque Copenhague fut fondée… Les arbres multiséculaires sont nombreux, beaucoup datant des efforts de plantation du parc à partir de 1762.
On trouve également beaucoup d’arbres morts, tombés ou sur pied. Le ministère de l’environnement qui gère le site veille à replanter et a créé de multiples exclos où la végétation forestière se restaure à l’abri de la dent des herbivores, et sans aucune intervention humaine.
Pour éviter la surpopulation, 700 cervidés sont prélevés chaque année de Dyrehaven, chassés pour la plupart, ou exportés. Les faons malingres ou tardifs, les animaux blessés, malades, affaiblis sont prioritairement éliminés, ainsi que les jeunes mâles présentant une ramure faible, refermée, peu ramifiée. La chasse est exclusivement réalisée par approche-affût, sans effarouchement des animaux et sans que le site soit fermé au public. Du fourrage est également apporté en hiver pour limiter l’impact des brouteurs sur la végétation naturelle. Le résultat est probant : il n’y a aucune trace de surpâturage à Dyrehaven.
Le paysage de Dyrehaven est diversifié et compte de nombreux arbres séculaires. © Djepi |
Laissés en paix depuis de multiples générations, les cervidés de Dyrehaven manifestent une indifférence complète vis-à-vis des nombreux promeneurs, joggeurs, cyclistes, des groupes d’élèves en visite ou des pique-niques en famille. Ils ne sont pas « domestiques », juste parfaitement inattentifs à la présence humaine.
L’entièreté de la réserve est accessible à tous, sauf durant la période du brame du cerf pendant laquelle, pour la tranquillité des animaux, il n’est pas permis aux visiteurs de quitter les sentiers. Mais cerfs et biches, eux, ne se privent pas de les emprunter… et de forcer parfois promeneurs et sportifs à rebrousser chemin !
A Dyrehaven, humains et animaux font bon ménage. © Djepi |
Vivre le brame du cerf à Dyrehaven est une expérience exceptionnelle, de par la beauté du milieu, la qualité des observations que permet la proximité des animaux, mais aussi par les impressionnantes ramures des mâles.
En effet, contrairement à ce qui se passe dans nos forêts chassées, ce ne sont pas les plus beaux cerfs qui sont éliminés jeunes pour finir comme trophées au mur, mais au contraire les moins bien coiffés. Un cerf adulte affichant 20 cors, pesant 230 kg et avec des bois de plus de 10 kilos est la norme au Jaegersborg.
Vivre le brame du cerf à Dyrehaven est une expérience hors du commun. © Djepi |
Le petit cerf Sika offre aussi un joli spectacle durant sa saison de rut qui démarre un peu après celle du cerf élaphe, et c’est ensuite le daim qui prend le relais à la mi-octobre.
Dans les épisodes qui suivent, je vous conterai mes découvertes durant les quelques jours que j’ai passés à Dyrehaven à l’automne 2021.
* La chasse à courre a pris fin au Danemark en 1777.
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