Brame 2021 à Han, la saga continue. Episode 1/4 : lever de rideau

Lever de rideau

18 septembre en soirée. Fidèle à mon principe de ne pas perturber les animaux sous le futile prétexte de les photographier, je me suis rendu à Han sur Lesse où un groupe de cerfs et biches en circulation libre est accoutumé à la présence de visiteurs depuis de multiples générations.

Pour les cerfs du domaine, les choses sérieuses ont commencé et le calme de la vaste vallée est bousculé par leurs retentissants coups de gueule.

18 septembre : Papy est déjà aux affaires.© Djepi

Comme l’an passé, le premier à m’accueillir dans la lumière qui décline doucement est Papy. Le grand coiffé est hardé et a réglé le volume du haut-parleur au maximum. Il pointe à nouveau 12 cors mais sa ramure me semble avoir régressé. Les surandouillers sont maigres et les épois moins longs qu’en 2020, alors que les longues pluies de l’été lui ont procuré une herbe grasse qui aurait dû favoriser un refait vigoureux. Mais Papy prend de l’âge et a sans doute dépassé son apogée. Peut-être commence-t-il à ravaler…

De l’autre côté du boqueteau, JL, lui, est toujours en forme olympique. Il contrôle la plus grosse partie des biches et, de sa belle voix chaude, répond du tac au tac aux raires râpeux de Papy. Cette année et comme en 2020, il ne porte que 14 cors (il en portait 18 en 2018 et 20 en 2019), mais sa couronne est plus lourde que jamais. Sa démarche souple et assurée atteste qu’il est le chef de l’orchestre.

Impérial, JL contrôle la plus grosse partie de la harde. © Djepi

Suite à une malveillance, il y a fort peu de biches cette année : la harde principale harde compte 22 non boisés, dont une douzaine de biches et bichettes fécondables seulement. La concurrence entre les prétendants s’annonce plus rude que jamais…

Papy avait joué des coudes en 2018 et évincé des concurrents aussi sérieux que Joli 14 et Le Crabe pour s’isoler avec un joli petit harem, alors que JL se réservait la part du lion. 2019 s’était révélée catastrophique pour lui, avec des blessures à la face dès le début du brame et une retraite précipitée. 

En 2020, Papy était redescendu dans l’arène mais s’en était rapidement fait expulser sans gloire par la puissance de JL et l’énergie de Joli 14.

En 2020, Papy porte encore les cicatrices des combats du brame précédent, mais ses bois sont plus puissants qu'en 2021. © Djepi

  

Cette année, le vieux cerf veut à nouveau tenter sa chance, une dernière fois peut-être. Il se pavane roidement parmi ses compagnes du moment. 

Mais les biches aiment par-dessus tout la compagnie de leurs parentes, et celles de Papy avancent insensiblement vers le gros de la troupe gardé par JL. Papy tente de les en empêcher, mais elles lui échappent comme l’eau coule entre les doigts d’un buveur maladroit. Les deux grands cerfs se rapprochent et chacun se porte en avant pour barrer à l’autre l’accès vers ses biches. 

Papy (à droite) et JL se rapprochent. Les choses sérieuses vont commencer. © Djepi

La tension est audible et palpable. Je me prends à transpirer dans l’air frais du soir qui tombe, et le flanc des coteaux renvoie en vibrantes rafales le fracas des raires. Aucun ne veut céder la place et 20 mètres à peine séparent maintenant les rivaux. Selon l’éternel rituel de l’espèce, ils s’engagent dans une marche parallèle, ultime étape de mise en garde réciproque avant que les choses ne dégénèrent vers la violence du combat, et ses risques.

Solennellement, d’un pas décidé, les cerfs descendent vers le bas de la pâture, puis font volte-face et regagnent la lisière. Aucun ne veut laisser à l’ennemi l’avantage de se trouver plus haut que lui sur la pente, ce qui pourrait être décisif en cas de combat. 

Papy (à gauche) et JL entament une bruyante marche parallèle. © Djepi

Les observant côte à côte, j’évalue aisément les forces en présence. La balance penche indéniablement vers JL, nettement plus massif que Papy, tant de corps que de bois. Le balaise doit en être conscient car, à diverses reprises, il baisse la tête en invitation au combat. Mais l’expérimenté Papy détourne le regard et décline, sans toutefois interrompre sa démonstration de force et d’audace.

Le puissant JL (à droite) invite Papy au combat, mais celui-ci décline. © Djepi

Après quelques tonitruants allers-retours, l’agressivité retombe d’un cran et les cerfs scellent le statu quo en retournant l’un et l’autre à leur harpail.

La nuit qui s’approche installe son mystère. A gauche, derrière, en haut résonnent d’autres brames. Qui sont les vocalistes ? Que tenteront-ils cette nuit, et avec quels résultats ?

Sans doute en saurai-je plus demain à l’aube…

La nuit arrive. Papy pourra-t-il conserver ses biches ? © Djepi

 

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