VOIR les TACHETÉS


Dans la savane très végétalisée de Kruger, le sprinter tacheté se porte bien   © Djépi

Photos et texte : Djépi

« Je veux voir des tachetés ! », telle était l’idée fixe de Nad, accro aux léopards et guépards depuis des séjours déjà anciens dans les savanes d’Afrique de l’est. Isa et moi, qui n’en avions jamais vu un poil, ne demandions pas mieux non plus…

Le léopard est assez abondant au parc national Kruger, avec un effectif estimé à 1000 individus (certaines sources parlent de 2000, preuve de la difficulté du comptage). Mais il ne fait pas dans l’ostentation comme son léonin cousin et l’apercevoir reste un privilège. Les tableaux d’observations des camps avaient beau s’orner ici et là d’une pastille bleue réservée à l’espèce, nous n’avions jamais encore eu la chance d’être au bon endroit, au bon moment.

Quant au guépard, c’est une espèce en difficulté un peu partout à cause du lion et de l’hyène qui lui dérobent ses proies et tuent ¾ de ses jeunes. Mais dans la savane très végétalisée de Kruger, le sprinter tacheté peut se dissimuler efficacement et il se porte bien, avec un effectif total estimé à 400 individus, jeunes compris. Restait à dénicher un de ceux-là !

👀

Nous accumulions 8 heures de drive déjà. La moisson matinale avait été excellente, avec girafes, éléphants, gnous, phacochères, steenbok, zèbres… Sans oublier les omniprésentes Impalas. 

La moisson matinale avait été excellente, avec éléphants, etc...   © Djépi

Une fois 10h, le mercure se met à grimper (jusque 25 ou 30°C, parfois 40°) et la plupart des mammifères se réfugient à l’ombre. Les observations se font plus espacées mais il reste les oiseaux, et notamment les étincelants choucadors, les étonnants calaos, les rapaces…

L'étonnant calao à bec jaune   © Djépi

Le frugal pique-nique rapidement englouti, nous reprenons la piste, un peu engourdis par le soleil et la digestion. Il est 14h30. Depuis sa banquette arrière, Nad nous réveille : « arrête, j’ai vu quelque chose, peut-être un… ». 

En douceur, Isa stoppe et enclenche la marche arrière. Aux aguets, nous revoyons lentement défiler le paysage. Nous longions un creux humide à la végétation dense piquetée de quelques plus grands arbres. Bon milieu pour un …

Et il est là, tout proche, dans la chevelure mouvante des hautes herbes   © Djépi

Et il est là, tout proche, traçant souplement une raie dans la chevelure mouvante des hautes herbes. Comme un périscope, la longue queue blanche émerge alors que le léopard s’enfonce dans les buissons. Les ocelles sombres du pelage se mêlent aux ombres des feuillages.

Pas un bruit, pas un froissement, à peine apparu et déjà disparu. Il a juste pris le temps de s’accroupir pour marquer son territoire et de nous laisser entrevoir sa mâlitude.

La longue queue blanche émerge alors que le léopard s’enfonce dans les buissons   © Djépi

Nous pivotons pour remettre la voiture en marche avant et roulons quelques mètres. Nous retrouvons le félinissime qui navigue en douceur dans l’océan végétal, avant de plonger définitivement au cœur des fourrés. 

3 minutes de rencontre avec le plus chat des félins. Nad a eu son tacheté ! Ce soir, on prendra un verre (de plus…) pour célébrer cela !

Le félinissime navigue en douceur dans l’océan végétal   © Djépi

👀

Deux jours plus tard, démarrage aux aurores, comme de coutume. Nous partons vers le nord par la route goudronnée, pour gagner un peu de temps. Le ciel est voilé et la lumière laiteuse encore peu abondante quand nous repérons des voitures arrêtées pêle-mêle sur la droite (on roule à gauche), signe immanquable qu’il y a « quelque chose » à voir de ce côté. 

Aux jumelles, nous repérons, sur un arbre mort éloigné, un vautour africain qui pose pour la photo. Joli tableau, mais je trouve bizarre que des voitures s’arrêtent pour un vautour : les touristes de Kruger sont plutôt affamés de poils et de crocs. 

Un vautour africain qui pose pour la photo   © Djépi

Nous nous apprêtons à repartir quand Isa qui est au volant souffle « un lion dans le buisson ! ». La silhouette se déplace, c’est un guépard qui émerge.

Il nous toise un instant, puis poursuit son chemin. Ce n’est ni la pesante indifférence du lion, ni la grâce sinueuse du léopard. C’est la classe pure, une élégance hautaine derrière laquelle on devine l’énergie. Celui-ci est un mâle en superbe condition.

Entre deux fourrés, il s’arrête et nous fixe   © Djépi

Nous étions derniers de la file ; le chemin du guépard fait en sorte que nous sommes maintenant aux premières loges. Buissons, contre-jour, sujet proche en mouvement, étroitesse de la voiture… la photo n’est pas aisée et il y aura du déchet. Alors, on garde le doigt appuyé sur le déclencheur et le sujet dans le viseur, tant bien que mal. 

Le grand chat dégingandé ne donne aucun signe d’inquiétude, mais ces volumineux objets qui avancent parallèlement à lui l’intriguent, l’agacent peut-être. Lions et léopard sont restés sans réaction face à nous, lui pas : le guépard est un émotif. Régulièrement, entre deux fourrés, il s’arrête et nous fixe, instant à saisir pour les photographes. Puis les longues jambes minces reprennent leur ballet.

D’un coup de reins, il rebrousse chemin et se met au trot   © Djépi

Soudain, d’un coup de reins, il rebrousse chemin et se met au trot. Sans nous laisser le temps de réagir, il a remonté la petite file de voitures et traversé la route. Il s’enfonce dans les hautes herbes et reprend calmement le cap qu’il souhaitait suivre, à l’écart des trublions. 

Petit à petit, le pelage fauve et tacheté se fond dans l’or mouvant de la savane, nous laissant à jamais héritiers de 8 minutes de magie.

Nad a eu son second tacheté. Et l’apéro en conséquence.

Le pelage fauve et tacheté se fond dans l’or mouvant de la savane   © Djépi

Pour les autres récits sur le parc national Kruger, cliquez ici

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